Pour une question de centimes (1)

Pas toujours facile de compter juste quand on fait ses courses.
Pas toujours simple de calculer à l'avance le montant de ses achats avant le passage en caisse.
Certains doivent certainement être fâchés avec les maths et un caddie rempli qui n'aurait pas dû dépasser 20 ou 30€ (c'est tout ce qu'ils ont pris comme monnaie) est parfois plus proche des 100€...
Et bien sûr, c'est de votre faute car c'est bien connu, la caissière est la responsable de tous les maux et de tous les prix (toujours trop chers) des articles du magasin. Le client mettra alors un point d'honneur à vous faire subir sa mauvaise humeur et sa mauvaise foi quand le montant total des courses sera affiché sur la caisse.
Le lot de situations est aussi varié que le nombre de clients passant à votre caisse. Les réactions sont parfois surprenantes.
Il existe tout de même de grands classiques
- Il me manque 1, 5, 10 centimes, vous allez bien m'en faire cadeau! (Certains tenteront même jusqu'à 1 ou 2 €...)
(Ben voyons et je vous laisse aussi votre billet ?)
- Je reviendrai vous payer demain.
(Il est loin le temps où l'on faisait crédit au client, surtout dans une grande surface...)
- Pour si peu, ça changera rien pour vous !
(Pour moi non, pour mon comptage ce soir, si, surtout que d'autres feront la même réflexion dans la journée)
- Vous vous êtes forcément trompée en passant les articles. C'est pas ce que j'avais compté.
(Ha, les erreurs de prix ça peut exister, mais de là à dire que c'est forcément de ma faute...)
Mais certaines histoires marquent plus que d'autres.
Pour quelques cacahuètes
J'ai le souvenir d'un jeune couple qui passait régulièrement au magasin acheter quelques articles de première nécessité, le tout en marque "premier prix". Avant de passer en caisse, ils notaient scrupuleusement le montant de chaque article pour calculer au plus juste.
Ce jour-là, d'après leurs notes griffonnées, il devait rester un peu de monnaie (à peine 5O centimes en réalité). Quand il ont vu le total affiché à ma caisse, conforme à leurs calculs, le jeune homme est reparti vite fait dans les rayons pour revenir quelques instants plus tard avec un paquet de cacahuètes premier prix.
- C'est vital, m'a-t-il l'ancé, le sourire aux lèvres.
Et le couple est parti ravi d'avoir pu s'offrir ce petit plaisir supplémentaire.
Quelques euros de plus
Un jeune homme arrive à ma caisse avec quelques bricoles (de la nourriture exclusivement). Venu le moment de régler les achats, panique à bord ! Il a beau compter et recompter sa monnaie et faire ses fonds de poche, il lui manque encore plus de 3€. Il y a foule dans le magasin. Les clients qui attendent derrière commencent à s'impatienter (soupirs et grommellements offrent un chouette concert live) et doivent craindre sans doute de devoir assister à une discussion interminable entre la caissière et le client.
Pour ne pas trop troubler le client, je lui demande discrètement :
- Vous avez combien sur vous ?
- 5€
- Il vous manque un peu plus de 3€. Voulez-vous que je vous donne le montant de chaque article (il n'y en a pas beaucoup) pour voir lesquels vous allez enlever ?
- Oui, je veux bien. Déjà, je vous redonne la boîte de conserve.
(Elle coûte 60 centimes)
Les soupirs se multiplient. Le client qui ne peut pas régler ses achats en totalité ne sait quoi enlever. Honnêtement, vu le contenu de ses courses, à sa place j'aurais eu aussi du mal à choisir quoi rendre.
Pris dans un dilemme intérieur, le jeune homme ne parvient pas à se décider. Et moi, je ne peux pas l'aider plus. Le client suivant se penche vers moi et me demande alors :
- Il lui manque combien ?
- (surprise) Un peu plus de 3€. Monsieur regarde quoi déduire de ses achats.
Il ouvre son porte-monnaie et me tend alors un billet de 5€ et dit au jeune :
- Et gardez la monnaie.
Un acte généreux, sans attente de retour d'aucune sorte. Si j'ai été surprise, le jeune homme l'a été bien plus. Il a timidement remercié et a filé.
Après son départ, je discute un peu avec le monsieur et je comprends que lui aussi a vécu la galère, les fins de mois difficiles, les achats minimalistes.
Un geste rare.
Un geste précieux.
Pour ma petite soeur
Ça me rappelle aussi une autre histoire, naïve celle-ci.
C'est un petit garçon (il doit avoir 9 ou 10 ans). Il passe à ma caisse et me tend deux jouets. Fier comme un coq, il m'explique avec un grand sourire :
- Tu vois, celui-là il est pour moi (il me montre une boîte de playmobil) et la poupée Barbie, c'est pour ma petite soeur. C'est un cadeau !
On sent toute la fierté dans son regard. Oui, mais voilà... quand j'annonce le montant total, il y en a pour près de 25€. Il me regarde avec des yeux ronds et me montre son porte-monnaie :
- J'ai que 15€.
Il me demande alors le prix de chaque article
- 12,35€ pour ton playmobil, 11,90€ pour la poupée.
Il réfléchit. Il calcule (il compte sur ses doigts). On sent son intense concentration.
Le client suivant qui vient d'arriver sourit en regardant la scène. Le jeune garçon me redemande encore le montant des deux articles, puis de chaque.
Cela dure quelques minutes.
Et ça y est, il se décide :
- Je vais prendre que mon Playmobil.
L'enfant paie son jouet et je lui rends sa monnaie. Il lui reste à peine 3€. Et sans doute dans un dernier espoir, il me demande :
- J'ai assez pour la poupée ?
- Non, mon grand, il te manque presque 10€.
- Ah, tant pis alors. Au revoir.
Il file avec son jouet visiblement très déçu. Allez savoir comment il a expliqué tout ça à sa petite soeur après...
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prochaine anecdote : histoires de centimes (la suite) – lieu : station service
Pas toujours simple de calculer à l'avance le montant de ses achats avant le passage en caisse.
Certains doivent certainement être fâchés avec les maths et un caddie rempli qui n'aurait pas dû dépasser 20 ou 30€ (c'est tout ce qu'ils ont pris comme monnaie) est parfois plus proche des 100€...
Et bien sûr, c'est de votre faute car c'est bien connu, la caissière est la responsable de tous les maux et de tous les prix (toujours trop chers) des articles du magasin. Le client mettra alors un point d'honneur à vous faire subir sa mauvaise humeur et sa mauvaise foi quand le montant total des courses sera affiché sur la caisse.
Le lot de situations est aussi varié que le nombre de clients passant à votre caisse. Les réactions sont parfois surprenantes.
Il existe tout de même de grands classiques
- Il me manque 1, 5, 10 centimes, vous allez bien m'en faire cadeau! (Certains tenteront même jusqu'à 1 ou 2 €...)
(Ben voyons et je vous laisse aussi votre billet ?)
- Je reviendrai vous payer demain.
(Il est loin le temps où l'on faisait crédit au client, surtout dans une grande surface...)
- Pour si peu, ça changera rien pour vous !
(Pour moi non, pour mon comptage ce soir, si, surtout que d'autres feront la même réflexion dans la journée)
- Vous vous êtes forcément trompée en passant les articles. C'est pas ce que j'avais compté.
(Ha, les erreurs de prix ça peut exister, mais de là à dire que c'est forcément de ma faute...)
Mais certaines histoires marquent plus que d'autres.
Pour quelques cacahuètes
J'ai le souvenir d'un jeune couple qui passait régulièrement au magasin acheter quelques articles de première nécessité, le tout en marque "premier prix". Avant de passer en caisse, ils notaient scrupuleusement le montant de chaque article pour calculer au plus juste.
Ce jour-là, d'après leurs notes griffonnées, il devait rester un peu de monnaie (à peine 5O centimes en réalité). Quand il ont vu le total affiché à ma caisse, conforme à leurs calculs, le jeune homme est reparti vite fait dans les rayons pour revenir quelques instants plus tard avec un paquet de cacahuètes premier prix.
- C'est vital, m'a-t-il l'ancé, le sourire aux lèvres.
Et le couple est parti ravi d'avoir pu s'offrir ce petit plaisir supplémentaire.
Quelques euros de plus
Un jeune homme arrive à ma caisse avec quelques bricoles (de la nourriture exclusivement). Venu le moment de régler les achats, panique à bord ! Il a beau compter et recompter sa monnaie et faire ses fonds de poche, il lui manque encore plus de 3€. Il y a foule dans le magasin. Les clients qui attendent derrière commencent à s'impatienter (soupirs et grommellements offrent un chouette concert live) et doivent craindre sans doute de devoir assister à une discussion interminable entre la caissière et le client.
Pour ne pas trop troubler le client, je lui demande discrètement :
- Vous avez combien sur vous ?
- 5€
- Il vous manque un peu plus de 3€. Voulez-vous que je vous donne le montant de chaque article (il n'y en a pas beaucoup) pour voir lesquels vous allez enlever ?
- Oui, je veux bien. Déjà, je vous redonne la boîte de conserve.
(Elle coûte 60 centimes)
Les soupirs se multiplient. Le client qui ne peut pas régler ses achats en totalité ne sait quoi enlever. Honnêtement, vu le contenu de ses courses, à sa place j'aurais eu aussi du mal à choisir quoi rendre.
Pris dans un dilemme intérieur, le jeune homme ne parvient pas à se décider. Et moi, je ne peux pas l'aider plus. Le client suivant se penche vers moi et me demande alors :
- Il lui manque combien ?
- (surprise) Un peu plus de 3€. Monsieur regarde quoi déduire de ses achats.
Il ouvre son porte-monnaie et me tend alors un billet de 5€ et dit au jeune :
- Et gardez la monnaie.
Un acte généreux, sans attente de retour d'aucune sorte. Si j'ai été surprise, le jeune homme l'a été bien plus. Il a timidement remercié et a filé.
Après son départ, je discute un peu avec le monsieur et je comprends que lui aussi a vécu la galère, les fins de mois difficiles, les achats minimalistes.
Un geste rare.
Un geste précieux.
Pour ma petite soeur
Ça me rappelle aussi une autre histoire, naïve celle-ci.
C'est un petit garçon (il doit avoir 9 ou 10 ans). Il passe à ma caisse et me tend deux jouets. Fier comme un coq, il m'explique avec un grand sourire :
- Tu vois, celui-là il est pour moi (il me montre une boîte de playmobil) et la poupée Barbie, c'est pour ma petite soeur. C'est un cadeau !
On sent toute la fierté dans son regard. Oui, mais voilà... quand j'annonce le montant total, il y en a pour près de 25€. Il me regarde avec des yeux ronds et me montre son porte-monnaie :
- J'ai que 15€.
Il me demande alors le prix de chaque article
- 12,35€ pour ton playmobil, 11,90€ pour la poupée.
Il réfléchit. Il calcule (il compte sur ses doigts). On sent son intense concentration.
Le client suivant qui vient d'arriver sourit en regardant la scène. Le jeune garçon me redemande encore le montant des deux articles, puis de chaque.
Cela dure quelques minutes.
Et ça y est, il se décide :
- Je vais prendre que mon Playmobil.
L'enfant paie son jouet et je lui rends sa monnaie. Il lui reste à peine 3€. Et sans doute dans un dernier espoir, il me demande :
- J'ai assez pour la poupée ?
- Non, mon grand, il te manque presque 10€.
- Ah, tant pis alors. Au revoir.
Il file avec son jouet visiblement très déçu. Allez savoir comment il a expliqué tout ça à sa petite soeur après...
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prochaine anecdote : histoires de centimes (la suite) – lieu : station service
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